Digi PT fait au Portugal ce que Free a fait en France

Après MasOrange et l'opérateur NOS, on continue à vous emmener voyager. Car une tornade venue de Roumanie a récemment frappé le marché des télécom au Portugal : Digi Portugal filiale de RCS & RDS, a débarqué sur le marché fin 2024 avec une ambition claire : casser les prix. Son entrée a été préparée en amont, grâce à l'achat de fréquences 5G lors du grand appel d'offres de 2021 (67 M€ d'investissement). A peine deux ans plus tard, DIGI lance ses offres et enclenche une véritable révolution.
Des tarifs chocs avec seulement un engagement de 3 mois!
- Mobile illimité (voix/SMS/data 4G/5G) : 7 €/mois
- Fibre 1 Gbps : 10 €/mois
- Fibre a 10Gbps : 15 €/mois
- Pack complet avec TV + Internet + Mobile + Fixe : ≤ 30 €/mois



Un lancement express
DIGI construit son propre réseau pendant deux ans avant le lancement commercial, en 2024, l’opérateur acquiert Nowo pour 150 M€ afin d’accélérer aider l'implantation dans le pays, Nowo (ex-Cabovisão) appartenait au groupe espagnol MásMóvil via Cabonitel, cette acquisition apporte à DIGI un réseau fixe déjà opérationnel en plusieurs zones du pays et un backbone national
Contrairement à Free Mobile lors de son lancement en France, DIGI a refusé de recourir au roaming national, l'opérateur explique que les conditions imposées étaient défavorables et a donc fait le pari risqué de déployer une infrastructure propriétaire dès le départ une stratégie audacieuse, qui rappelle l’histoire de l’opérateur portugais OniWay.
Ce dernier, au début des années 2000, avait obtenu une licence mobile nationale et prévoyait de lancer ses services et pourtant, les opérateurs historiques ont refusé de garantir l’interconnexion des appels et SMS, malgré une décision favorable des tribunaux, OniWay ne parvient pas à lancer son offre et ferme avant même d’avoir commencé.
DIGI devient ainsi le premier nouvel entrant réel à s’imposer sur le marché portugais : un fait historique.
Les anciens opérateurs contre-attaquent
Tous les opérateurs réagissent. MEO utilise UZO(opérateur low-cost) Vodafone multiplie les promos, et NOS ajuste ses offres WOO, même les marques jeunes (Yorn, Moche, WTF) s'alignent.
Chez WTF de NOS a proposé brièvement un forfait 1 To pour 16 €/mois, du jamais vu dans ce pays

Avant l’arrivée de DIGI, les forfaits jeunes plafonnaient autour de 20 à 75 Go/mois.

Après DIGI, les offres explosent en volume et chutent en prix.

La secousse provoquée par DIGI ne se limite pas aux marques jeunes, même l’opérateur principal NOS, historiquement peu enclin à offrir des remises massives, a commencé à proposer des offres de rétention très agressives à ses clients les plus fidèles.
Un exemple concret : c'est moi, un abonné historique Optimus/NOS/WTF depuis 2008, j’ai obtenu le forfait NOS Mobile Sem Limites Max pour 15€/mois avec engagement de 24 mois, simplement en contactant le service client.
Le forfait inclut données mobiles illimitées (4G/5G), appels/SMS illimités, et le roaming en Europe.

Mais ce n’est pas tout, un autre abonné a réussi à obtenir exactement le même forfait pour 12,50€/mois

Un marché sous pression
DIGI est rapidement devenu l'opérateur le plus recherché sur les plateformes de consommateurs comme Portal da Queixa, cumulant plus de 500 plaintes en quelques semaines après son lancement, environ 35 % concernaient la qualité du service (coupures, appels qui n'aboutissent pas), suivies par des problèmes de portabilité (près de 18 %) et d'installation de la fibre, certains utilisateurs se sont retrouvés injoignables pendant plusieurs jours, malgré cela, DIGI répond rapidement aux plaintes, avec un délai moyen de 48 heures, et parvient à retenir plus de 75 % des clients après résolution.
Les clients saluent les économies réalisées, mais l'arrivée de DIGI ne s'est pas faite sans accroc :
- Retards d'installation fibre
- Portabilité longue
- Couverture inégale (zones rurales)
- Roaming en UE/EEE inactif au départ
- Support client parfois difficile à joindre
Sur les forums portugais comme Zwame, Reddit et Fórum da Casa, les témoignages se multiplient, certains louent la liberté offerte, d'autres conseillent la prudence en attendant une amélioration de la couverture, des utilisateurs notent que les vitesses 5G en ville sont excellentes, mais que le signal reste faible dans les zones rurales ou à l'intérieur des bâtiments.
La couverture dans le métro de Lisbonne et Porto, par exemple, est encore absente, faute d'autorisation d'installation d'antennes, DIGI progresse vite : roaming activé, appli améliorée, extension du réseau.
La pression exercée sur le marché est telle que, début avril 2025, NOS a annoncé un plan de restructuration, malgré un bénéfice record de 273 millions d'euros en 2024., selon la presse eco.sapo.pt cette décision pourrait inclure des licenciements et viserait à adapter la structure du groupe à la nouvelle réalité concurrentielle imposée notamment par l'arrivée de DIGI.
Une révolution douce mais bien réelle
À l’image du choc provoqué par Free en France en 2012, DIGI a déclenché une véritable secousse dans le paysage télécom portugais, en quelques mois à peine, l’opérateur roumain a mis fin à un statu quo tarifaire qui durait depuis plus de dix ans : forfaits onéreux, engagements systématiques et une concurrence quasi inexistante. DIGI a imposé des offres simples, à bas prix, avec seulement trois mois d’engagement, forçant les opérateurs historiques à réagir, aa stratégie, aussi offensive qu’ambitieuse, s’est déployée sur un marché réputé difficile : faible rentabilité, infrastructures inégalement réparties, et marges commerciales étroites. Pourtant, cette révolution aurait pu arriver plus tôt, comme en Belgique autre pays marqué par des tarifs élevés et une faible dynamique concurrentielle.
Le groupe Iliad, à l’origine du bouleversement français, disposait des moyens pour reproduire ce modèle en Belgique et au Portugal, avec son expérience, sa technologie, et sa culture du « Made in France », Iliad aurait pu ouvrir une nouvelle ère dans ces marchés, mais ce choix stratégique n’a jamais été fait.
C’est donc DIGI, acteur inattendu venu de Roumanie, qui a saisi l’opportunité. Grâce à son infrastructure propre, une politique tarifaire agressive et un calendrier de déploiement rapide, DIGI réalise au Portugal ce que Free avait accompli en France : créer une rupture. Aujourd’hui, l’opérateur s’impose comme un acteur central, capable de transformer en profondeur un marché longtemps figé, reste à voir s’il confirmera dans la durée, mais une chose est certaine : le marché portugais ne reviendra pas en arrière.